Akhétaton

Mardi 23 Juin 2020-00:00:00
' Ayman Elghandour

Il est difficile d'aborder Akhénaton sans mettre l'accent sur Akhétaton, la nouvelle capitale qu'il a faite construire. C'est lui qui a choisi l'endroit vierge de cette ville qui n'appartenait à aucune divinité. Il y a dressé un autel consacré à Aton qui était intrus à Thèbes, la cité d'Amon. « Le site choisi se trouvait à mi-chemin entre Memphis et Thèbes, sur l'emplacement de la moderne Tell el-Amarna » dont le nom est dérivé de la tribu de Béni Amran. Quinze ans après son achèvement, cette cité a été dévastée, pillée au point qu'on a utilisé ses pierres pour édifier des villages voisins.

La cité a été découverte aux temps modernes, grâce aux travaux d'une mission privée. Après avoir fouillé les tombes de Tell el-Amarna entre 1883 et 1893, « les membres de cette mission recueillirent les inscriptions des grandes stèles sculptées sur les falaises des environs, qui apparemment marquaient les limites d'une ancienne ville appelée Akhet-Aton ». Les fouilles ont repris en 1907, par des Allemands qui ont pu révéler une grande partie de cette cité, cachée longtemps sous les sables, ils y ont trouvé des temples, des palais royaux, ainsi qu'un village de travailleurs. A ce propos je vous présente ce qu'avaient dit Mahfouz et Sinoué dans Le vivant de la vérité et Akhénaton ou le dieu maudit.

Mahfouz ne s'est intéressé à décrire Akhétaton, il n'a cité aucune information concernant ses frontières et ses divisions. La cité nous paraît dès le début, dévastée, transformée en ruines. L'auteur en a présenté une seule description : Cité de la lumière et de la foi, aux avenues spacieuses, aux immenses palais, aux jardins verdoyants, aux entrelacs de canaux artificiels, chef-d'œuvre d'art et de beauté qui fut assailli par la haine et devint la proie du clergé et du temps. Pour lui, Akhétaton est la cité de la lumière, dans laquelle naît le premier monothéisme, basé sur l'amour, la paix, la tolérance et l'égalité. Ceci paraît évident avec les paroles expressives d'Aÿ qui dit : « Nous coulâmes des jours plus doux que les rêves grisés de Bonheur, de gaieté, d'amour et de prospérité ». La période d'el-Amarna était une révolution à la fois sociale, religieuse et culturelle. Elle a mis fin à la sauvagerie et a donné l'occasion aux pauvres de s'exprimer.

Avant de terminer son roman, Mahfouz a mis l'accent sur la ville dévastée. Méri Moun y est allé pour rencontrer Néfertiti. Lors de son arrivée, nous ne trouvons que la destruction. « Le tracé des avenues spacieuses disparaissait sous les amas de poussière, les tas de feuilles mortes des arbres desséchés, et les débris de bois arrachés aux portes et aux fenêtres par la furie des éléments ». Cette scène expressive annonce catégoriquement la fin de l'époque amarnienne. Tenant cette destruction pour une colère divine, Toutankhamon a décidé de quitter cette ville néfaste et de faire de Memphis, sa cité résidentielle.

Contrairement à Mahfouz, Sinoué a exprimé d'une manière concise tout ce qu'avait dit le romancier égyptien: Akhénaton a fait bâtir Akhétaton, ville consacrée à Aton qui en avait marqué le site. « C'est Aton qui a voulu cette ville afin que l'on y commémore son nom ». Ensuite, l'écrivain a abordé en détail les quartiers de la ville, ses bâtiments, ses frontières, le centre administratif et la zone urbaine. De plus, l'auteur nous a surpris en présentant une carte géographique à la page 186 de son roman, désignant facilement les contours de la ville, la localisation des bâtiments variés : Grand temple, temple du fleuve, Autel du désert, cité des ouvriers … etc.

Tel un guide, Sinoué nous emmène à la ville, il commence par la zone urbaine, située sur la rive droite du Nil. Nous voyons la grande porte du nord à travers laquelle on accède à trois routes: la voie du grand prêtre, celle des ouvriers et la voie royale qui borde le fleuve et qu'on appelle maintenant « Sikket essoultan ». Aussi ya-t-il trois quartiers remarquables: celui du nord où se trouvent un petit sanctuaire, le grand et le petit temples et des jardins; le quartier central qui comporte le palais d'Aton et enfin le quartier du sud qui regroupait les maisons les plus luxueuses d'Amarna, dont […] celle du vizir Nakht. Le nom de ce dernier donne une crédibilité à cette information dont nous trouvons l'écho chez Cyril Aldred. Celui-ci affirme que la cité du sud comportait les demeures des fonctionnaires les plus importants tels Pinhasy, serviteur en chef d'Aton, et le vizir Nakht. L'auteur a de même présenté le village des ouvriers, situé dans une vallée creusée dans le désert. Ces derniers y vivaient, accompagnés de leurs familles. Après tout cela, il nous surprend en annonçant qu'Akhétaton se transforma en ruines. La cité de l'Horizon est déserte. Mis à part quelques chacals qui viennent y rôder la nuit.